/ Blog /
Risques psychosociaux en entreprise
Le baby-foot présent dans la salle de réunion ne représente pas une solution efficace pour lutter contre le mal-être au travail. Il est crucial de remettre en question l'organisation du travail ainsi que sa signification pour y remédier. Actuellement, quatre catégories de risques psychosociaux sont identifiées : le stress, les violences internes (par exemple le harcèlement), les violences externes (par exemple les relations avec les clients) et l'épuisement psychologique (qui peut entraîner un burnout).
Les RPS peuvent entraîner des conséquences sur la santé, qu'elles soient physiologiques, psychologiques ou somatiques. Les niveaux de gravité varient de la simple fatigue passagère à des cas extrêmes tels que le décès. Les entreprises subissent alors des impacts négatifs, allant d'un simple arrêt de travail à une désorganisation durable et une détérioration du climat social.
Malgré une prise de conscience grandissante et une accumulation de connaissances sur les RPS, les managers ont souvent du mal à trouver des solutions face à la souffrance de leurs collaborateurs. Pourquoi y a-t-il si peu de progrès réalisés dans ce domaine ?
Qu'avons-nous loupé ?
Au départ, des mesures préventives ont émergé pour tenter de réparer les dommages sur la santé des salariés en identifiant les personnes en détresse et en leur fournissant des services psychologiques tels que des consultations et des lignes d'assistance.
Plus récemment, les initiatives relatives à la qualité de vie au travail (QVT) ont cherché à mettre en place des dispositifs pour prévenir l'apparition des risques. Des programmes de bien-être au travail ont ainsi vu le jour, avec un large éventail d'actions allant des services comme les salles de sport, de sieste ou de jeu (dont le célèbre baby-foot devenu l'icône caricaturale des programmes QVT "cosmétiques") jusqu'aux outils de communication pour l'entreprise.
Cependant, ces approches ne traitent que les symptômes plutôt que les causes. En effet, il est prouvé que les facteurs de risque en amont des RPS sont principalement d'ordre organisationnel, tels que le temps et l'intensité du travail, ou encore la qualité des relations sociales au bureau. Il est donc essentiel de se concentrer sur ces facteurs pour remettre en question le travail et son organisation. Pourtant, du point de vue managérial, il est difficile de remettre en cause l'organisation du travail. Certains managers peuvent même rétorquer que "nous ne vivons pas dans un monde idéal". Cependant, cela ne tient pas compte du fait que chaque individu réagit différemment à un même stimulus, comme une agression verbale ou une charge de travail excessive.
Il est désormais clairement établi et documenté que les facteurs de risques sont à l'origine des RPS. Le rapport Gollac dresse une liste détaillée de ces facteurs, et agir en amont permet de prévenir leur apparition et d'éviter les conséquences préjudiciables sur la santé mentale des employés. Pour cette raison, l'Anact recommande d'agir simultanément sur trois niveaux : aider les individus en souffrance (pour réparer), atténuer les risques (pour les réduire) et éviter les facteurs de risques (pour les empêcher). Dans cette optique, le coaching apparaît comme bien plus qu'une simple réponse, mais plutôt comme une solution humaine, adaptée et concrète.
Des réponses inefficaces
Il est possible que l'échec du management à gérer la santé mentale au travail soit dû à l'inadéquation de la boîte à outils du manager avec les spécificités des RPS. En effet, les outils habituellement utilisés pour gérer les risques ou pour la santé et la sécurité au travail (SST) ne sont pas adaptés pour traiter les RPS, qui sont des risques atypiques à plusieurs égards. La méthode classique consiste à chercher les liens de causalité entre l'exposition et les conséquences, leur fréquence et leur niveau de dangerosité pour déterminer, par exemple, la charge maximale qu'un individu peut porter ou les niveaux sonores à ne pas dépasser.
Cependant, ces approches ont eu pour conséquence d'accroître l'invisibilité des RPS dans les organisations. Les RPS sont des risques atypiques, car les liens de causalité sont distendus et chacun peut y réagir différemment. De plus, ces risques sont différés dans le temps et cumulatifs, ce qui peut les rendre itératifs, comme dans le cas où le stress génère de la violence, qui à son tour provoque plus de stress. Enfin, il y a l'effet cocktail, où l'accumulation de facteurs peut accélérer les conséquences délétères.
Les RPS présentent une particularité supplémentaire en ce qu'ils touchent à la fois la sphère privée, publique et professionnelle. Parfois, le soutien du réseau social privé peut compenser des difficultés professionnelles, ce qui rend les RPS encore plus invisibles aux yeux des managers. Ces derniers peuvent facilement rejeter les problèmes psychosociaux dans la sphère publique en donnant des explications rapides telles que "il était stressé à cause de la pandémie" ou renvoyer les problèmes à la sphère privée en disant "il avait des problèmes de couple". Cependant, les RPS sont comme une goutte d'eau qui fait déborder le vase, et chacun a une taille de vase différente. Pour éviter que le vase ne déborde pour certains et pour prendre en compte les différentes situations, le management doit trouver des outils pour rendre compte des RPS et les prendre en compte dans l'organisation du travail.
© Quasar Lille
Pour aller plus loin
INRS - Santé et Travail
ANACT - Agence Nationale pour l'Amélioration des Conditions de Travail
Risques et souffrance au travail, étude.
David Alis, Marc Dumas, Gwenaëlle Poilpot-Rocaboy, 2010
Sciences Humaines
Comment manager aujourd'hui ?, 2019