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Coronavirus. Ou l'histoire d'une évolution.
Coronavirus. Comment en sommes-nous arrivés là ? Ne remontons pas plus loin que la révolution agricole c’est-à-dire environ 10 000 ans avant notre ère. La terre comptait environ 10 millions de fourrageurs nomades. L’homme se mit alors à consacrer son temps et ses efforts à manipuler la vie d’un petit nombre d’espèces animales et végétales.
Regardons plus en détail les conséquences de cette révolution :
- un siècle avant notre ère, la terre comptait 250 millions de cultivateurs sédentaires, clairement un succès démographique
- amorce d’un cycle infernal : besoin de mains aux champs qu’il faut nourrir et donc cultiver davantage
- apparition d’un être humain plus égocentrique marquée par le besoin de disposer d’un terrain, la naissance de la propriété
- accumulation d’objets et de biens puisqu’il n’est plus nécessaire de les transporter
- possibilité de s’entasser dans des villages puis des villes en se nourrissant des excédents produits par les cultivateurs
- besoin de se projeter sur le futur (pour les récoltes) à l’origine d’un stress qui sert de fondement à de nouveaux ordres politiques, sociaux, religieux
- passage d’une connaissance large de son environnement à une forme d’expertise avec nécessité de faire confiance aux autres pour le reste
Il semblerait que les fondements du monde moderne étaient ainsi bien posés…
Et le bonheur dans tout cela ?
Si, l’on peut affirmer que la révolution agricole a permis d’augmenter la quantité totale de vivre à disposition de l’humanité, on peut sérieusement douter qu’elle ait permis d’offrir aux hommes une meilleure vie. De même que le compte en banque bien garni d’une entreprise ne garantit pas le bonheur de ses salariés.
Il est admis qu’au-delà d’une certaine taille (quelques dizaines d’individus), la coopération au sein d’un groupe n’est possible que par l’existence de mythes ou croyances communes. L’apparition des ordres est la conséquence cette nécessité.
Quels sont les ordres dominants en 2020 ?
Avec la mondialisation, on observe une tendance lourde à la disparition des petites cultures au profit de méga-cultures dominantes. En simplifiant à l’extrême, la quasi-totalité de la planète partage le même système géopolitique (états internationalement reconnus), le même système économique (capitaliste), le même système juridique (droits de l’homme et droit international) et le même système scientifique (communauté interconnectée). Concernant la religion, en dehors du Sud Est asiatique, la plupart des peuples adhèrent à une forme ou une autre de religion monothéiste, et l’ordre politique mondial repose sur des fondations monothéistes.
Regardons de plus près le credo du capitalisme.
Le mythe fondateur est que l’augmentation des profits des entrepreneurs privés est la base de la croissance de la richesse et de la prospérité collective. La croissance économique devient ainsi le bien suprême et tout le reste en dépend : justice, liberté et même bonheur. La croyance du capitalisme en une croissance économique perpétuelle va pourtant contre tout ce que nous savons de l’univers ou presque. L’économie humaine n’en a pas moins réussi à continuer de croître tout au long de l’ère moderne pour la simple raison que les hommes de science ont enchaîné les découvertes.
Tout le monde est terrifié à l’idée que la crise économique qui va accompagner la crise sanitaire puisse arrêter la croissance. La révolution industrielle a enrichi les banquiers et les détenteurs de capitaux mais a condamné des millions de travailleurs à la misère. Sur les 500 dernières années, la population a été multipliée par 14, la production par 250 et la consommation d’énergie par 120. Le gâteau économique actuel est donc beaucoup plus important mais sa distribution n’a jamais été aussi inégale.
Pour survivre, l’économie capitaliste moderne doit sans cesse augmenter la production, mais cela ne suffit pas : il faut trouver des acheteurs. Une nouvelle forme d’éthique est apparue : le consumérisme. Le commandement suprême du riche est : « investis », celui du commun des mortels : « achète ».
La question du bonheur elle, est moins que jamais résolue.
Quelles sont les causes de la crise sanitaire actuelle ?
Elle est d’origine animale, comme les pandémies précédentes, SIDA compris. Le non-respect des habitats historiques et le trafic des animaux sauvages multiplient les risques. La facilité avec laquelle on transporte les êtres humains ou les marchandises d’un bout à l’autre de la planète autorise la diffusion à grande échelle en un temps record. Au-delà, on peut concevoir que les formes d’élevage intensif et la consommation excessive permettent la naissance de virus.
Que met-elle en évidence ?
La préoccupation principale de nos sociétés n’est pas l’être humain, c’est la bonne santé économique (et il est donc nécessaire de se reconfigurer complètement pour sauver des vies humaines).
La crise de confiance envers les politiques et les élites est bien plus profonde qu’une simple critique de tel ou tel comportement, communication ou décision. C’est la hiérarchie des valeurs, le sens, la finalité qui interrogent.
Les tensions dans le monde médical entre les fonctions étatiques centralisées et les acteurs de terrain me rappellent les éternels débats organisationnels en entreprise sur le rôle des fonctions support. Des solutions organisationnelles existent, elles nécessitent des changements profonds. La machine étatique ne peut continuer à fonctionner ainsi, sans que cela ne remette en cause l’engagement individuel des fonctionnaires.
La différence de traitement de la crise entre les pays selon le régime politique (prise de décision, respect, confiance réciproque, rapidité d’exécution, communication, principes de précaution, mobilisation des moyens) nécessiterait à elle seule un post.
Au-delà des interrogations qui pointent sur la notion d’indépendance (des continents, des états…), le vrai débat est la localisation. On ne peut pas continuer à produire et transporter d’un bout à l’autre de la planète, ceci imposera de renoncer au profit maximal.
Et après ?
J’espère que la recherche de bouc-émissaire ne prendra pas trop de temps, elle ne servira pas à grand chose sauf à faussement calmer les angoisses. Les économistes vont vouloir relancer la machine et refaire la même chose, c’est une certitude, ils vont tenter de minimiser la portée de la catastrophe que nous vivons.
On risque d’accélérer la création de toute pièce de liquidités à injecter dans le système du crédit bon marché, tout en espérant que les scientifiques parviennent à trouver quelque chose de vraiment géant avant que la bulle n’explose. Dans le passé, les grandes catastrophes ont, à chaque fois, généré des bouleversements conséquents dans le fonctionnement de nos sociétés.
J’espère que l’on va changer de paradigme, et que pour la première fois, on va faire passer la vie des individus avant l’économie. Cela passera par un changement profond, la nécessité de revisiter complètement la hiérarchie des valeurs, de bousculer les croyances bien ancrées, de se poser la question du sens, de se poser de vraies questions existentialistes. L’individualisme nous a déjà coûté beaucoup trop cher.
En ce qui me concerne, je vais sagement respecter les principes que l’on m’a inculqué : pense globalement et agis localement. Le coaching est un terrain idéal pour accompagner les personnes qui veulent s’éloigner de ce qu’elles connaissent mais ont des freins puissants, celles qui cherchent vers quoi elles veulent aller, celles qui ont une idée claire des changements à opérer et se heurtent à des oppositions farouches.
© Quasar Lille